Ils sont restés ensemble

Ils sont restés ensemble parce qu’on reste ensemble

tant qu’on n’a pas traversé d’épreuve majeure 

mettant le couple en péril, dans ce que la norme sociale 

considère comme un motif de rupture valable.

 

Ils sont restés ensemble parce qu’on est tous à la même école,

qu’il est rassurant de voir que l’on traverse les mêmes ennuis, 

malgré notre sentiment d’impuissance et un ras le bol;

malgré notre amour si différent qui s’est lui aussi terni.

 

Ils sont restés ensemble parce qu’ils n’ont pas eu d’exemples

leur montrant qu’il est possible de faire autrement. 

D’avoir un lien aux autres attentes et d’accepter d’être séparés 

pour prioriser leur propre épanouissement.

 

Ils sont restés ensemble car ils ont intégré la notion de sacrifice 

que le couple monogame exclusif exige,

de supposer comme normal de censurer certains de leurs désirs

car on entretient la même croyance, même si on s’asphyxie.

 

Ils sont restés ensemble car ils arrivent à un âge 

où les dires de leur entourage rends insécure le fait d’être seul,

que l’horloge biologique rabâche le temps qui passe

et qu’une pensée collective a défini ce que doit être le bonheur.

 

Ils sont restés ensemble car ils ont un ou plusieurs enfants,

prévu avec désir ou en accident du chaos de la vie,

qu’ils se sentent pieds et poings liés à l’autre parent,

estimant préférable d’attendre qu’ils grandissent, pour déguerpir.

 

Ils sont restés ensemble parce qu’ils n’ont pas trouvé mieux,

conscients de la perte d’estime qu’a leur famille nucléaire,

faisant chambre à part dans leurs têtes, silencieux,

choisissant d’être mal aimé que la voie inconnue du solitaire.

 

Ils sont restés ensemble car ils ne savent pas quoi faire, 

qu’ils sont unis l’un à l’autre devant l’État et jusqu’à la banque,

avec trop de paperasses à gérer s’ils devaient s’en défaire,

assumant que leurs propres floraisons n’a plus d’importance.